Pour une fois, j’ai décidé d’écrire un article sur un sujet simple et léger. Je vais vous raconter ici le road trip que moi et ma compagne avons entrepris en avril 2019.
Le trajet prévu
C’est la deuxième fois que nous allons au Japon. La première fois, nous avions principalement visité Tokyo (où nous étions arrivés en avion) et Kyoto (nous avions loué une voiture pour faire l’aller-retour Tokyo-Kyoto). Pour ce deuxième voyage, notre objectif était de découvrir les villes moins connues du Japon, et de voir de nombreux paysages en faisant un road trip du Nord au Sud.
Nous voulions faire le plus long road trip possible, et nous avons donc choisi d’arriver à l’aéroport de Misawa, la ville la plus au nord de l’île principale (Honshū). Ce n’est pas à proprement parler l’endroit le plus au Nord du Japon, car nous aurions pu arriver sur l’île d’Hokkaidō. Mais on ne peut pas traverser directement d’Hokkaidō à Honshū en voiture, il aurait alors fallu prendre le ferry, ce qui est assez cher. Pour le retour nous avons choisi de partir de l’aéroport de Kagoshima, le plus au Sud, sur l’île de Kyūshū.
Envol pour le Japon
Il n’y a pas de vol direct depuis la France pour ces villes moins connues. Par ailleurs, seule la compagnie Japan Airlines dessert l’aéroport de Misawa. Nous prenons donc des vols qui passent par Tokyo. À Roissy, le personnel de Japan Airlines est très serviable, et l’hôte au guichet de l’enregistrement nous dit “Vous allez à Misawa ? C’est pas courant comme destination ! Qu’est-ce qu’il y a là-bas ?”. Nous répondons “On ne sait pas, on verra !”
Il faut comprendre qu’une particularité de la manière dont nous faisons des road trips est que nous planifions très peu à l’avance ce que nous allons faire. Il y a bien 2 ou 3 endroits où nous avons prévu d’aller absolument (comme l’île aux chats, on en parle plus loin), mais nous n’avons choisi ni l’itinéraire, ni même les villes où nous allons passer. Les seules choses que nous avons réservé depuis la France sont le billet d’avion, l’hôtel pour le premier soir ainsi que la voiture de location.
Attention pour ceux qui seraient tentés de faire un road trip également, il est nécessaire d’obtenir une traduction de votre permis de conduire en japonais, et cette procédure prend plusieurs mois. C’est en fait la seule chose qu’il était vraiment indispensable de prévoir à l’avance.
Arrivée à Misawa
Nous atterrissons à Misawa. C’est un tout petit aéroport, avec une seule salle des arrivés pour récupérer nos bagages. Misawa est en fait une base aérienne militaire assez grande, qui regroupe des soldats japonais et américains. L’aéroport civil est tout petit à côté, et utilise la piste d'atterrissage de la base militaire, puis l’avion roule jusqu’à l’aéroport civil.
Au passage, je remercie le personnel de l’aéroport de Misawa pour m’avoir aidé à retrouver mon téléphone, alors qu’ils étaient en train de tout ranger dans l’aéroport car nous devions être le dernier vol de la journée.
Nous récupérons notre voiture de location. Nous avons loué une voiture typiquement japonaise, de marque Daihatsu, qui a la particularité d’être très peu large mais assez haute. Notre expérience des rues de Tokyo deux ans auparavant nous avait fait réaliser à quel point les rues sont parfois étroites (surtout à cause des énormes poteaux électriques qui sont sur le bord des rues) et l’intérêt de ces petites voitures qu’on voit partout au Japon. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, la voiture est très confortable, même pour passer de longues journées sur la route à deux.
Nous devons donc nous rendre à notre hôtel, qui est dans la ville de Hachinohe (八戸市). Mais il nous faut prendre l’autoroute payante et on ne peut payer qu’en espèces ou utiliser le système de télépéage “ETC”. Or nous n'avons ni ce système "ETC" ni d'espèces sur nous. Déjà lors de notre voyage précédent et notre long trajet Tokyo-Kyoto, nous avions paniqué car nous n’avions pas assez d’espèces sur nous, et nous nous étions arrêtés à toutes les aires d’autoroutes du trajet pour chercher désespérément un distributeur de billets compatible avec les cartes occidentales (et oui car beaucoup de distributeurs ne sont pas compatibles avec les cartes Visa/Mastercard !). Nous avions fini par trouver un distributeur et nous avions donc pu payer sans problèmes à la sortie.
Mais revenons à notre histoire, nous cherchons donc un distributeur de billets. Nous avançons donc sur les routes de campagne jusqu’à trouver un commerce. Il fait nuit et le bord des routes est enneigé (mais pas au point que la neige soit vraiment gênante). Notre GPS, réglé sur un distributeurs de billets, nous fait tomber sur un étrange bâtiment éclairé, que nous pensons être une supérette. Nous entrons donc dans ce bâtiment et voilà ce que nous voyons :
Nous nous demandons ce que font les gens dans cet étrange endroit, et nous pensons qu’il s’agit en fait d’un système de paris, un peu comme le PMU en France, sauf que l’endroit est exclusivement dédié à cette activité. Je trouve un distributeur de billets mais tout est écrit en japonais et on ne peut pas choisir la langue. Par chance un agent de police monte la garde et ma femme (qui parle japonais) lui demande de l’aide. Mais en fait le distributeur n’est pas compatible avec les cartes occidentales.
Je ne me rappelle plus très bien comme nous avons trouvé de l’argent au final, mais je crois que nous avons trouvé un FamilyMart : ces petits magasins très pratiques présents partout au Japon sont ouverts 24h/24 et ont tous un distributeur compatible avec les cartes occidentales.
Hachinohe (八戸市) et Misawa (三沢市)
Le lendemain matin, nous nous promenons un peu dans les rues de Hachinohe. Au Japon il n’y a pas de vieux quartiers qui s’opposent aux quartiers modernes comme en Europe, car ici tout est mélangé. On trouve aussi bien un cimetière traditionnel, un temple et une salle remplie de machines à sous dans la même rue.
L’après-midi, retour à Misawa pour visiter le musée de l’aviation qui est à côté de la base aérienne (l’aviation a une place importante ici).
La route dans les montagnes
Le lendemain, nous partons dans les montages pour aller sur un pont où parait-il il y a une vue magnifique. Nous montons donc dans la montagne pour nous rendre à ce lieu.
Sur le trajet, nous voyons plein de panneaux lumineux avec des informations écrites en japonais que nous ne comprenons pas. La route est quasiment déserte, et nous nous arrêtons simplement dans un petit village pour prendre un café à un distributeur. Au Japon il y a plein de petits distributeurs en libre-service (“vending machines”) où on peut acheter des boissons fraîches ou des cafés chauds en canettes pour 100 à 150 yens (1 euro = 120 yens environ). Ces machines sont toujours en parfait état, même au fin fond de la campagne, ce qui montre que les japonais sont très respectueux et qu’il y a peu de dégradations.
Mais après deux heures de route, nous arrivons face à un gros tas de neige en plein milieu de la route au bout d’un village : la route n’a pas été déblayée plus loin. Nous rebroussons donc chemin, mais nous ne regrettons pas cette excursion dans la montagne pour autant !
En route vers Ishinomaki (石巻市)
Un des rares objectifs que nous avions prévu à l’avance était la découverte de l’île aux chats. Nous partons donc direction Ishinomaki, la ville où se situe le port permettant de se rendre sur l’île. Sur le trajet, il neige fortement et la visibilité est mauvaise.
J’en profite pour parler de la route et de la conduite au Japon. Déjà, vous avez peut-être remarqué qu’on roule à gauche. En réalité, on s’y habitue vite. Par ailleurs, les japonais sont prudents et extrêmement courtois sur les routes. Pour avoir conduit en France, au États-Unis, en Allemagne, au Canada et au Japon, c’est en France que les conducteurs sont les plus nerveux et agressifs ! Aux États-Unis, les gens sont globalement beaucoup moins nerveux qu’en France, mais au Japon c’est le niveau ultime de la courtoisie. Les conducteurs n’ont jamais de comportement dangereux. À Tokyo, lors de notre précédent voyage, j’avais même bloqué la circulation sur une voie pendant quelques minutes car je m’étais mal placé sur la voie pour tourner (à Tokyo il y a des configurations de routes très bizarres) et personne ne s’était énervé.
Pour se déplacer au Japon, on utilise beaucoup les autoroutes. Dans les parties montagneuses, on alterne entre les ponts et les tunnels. La vitesse limite la plus élevée qui existe est 100 km/h (sur autoroute uniquement), et en fait pendant la plupart de notre road trip la vitesse était limitée à 80 km/h par panneaux à affichage lumineux (peut-être à cause de la saison ?). Mais en fait quasiment tout le monde roule à 100 km/h quand même, ce qui nous a surpris car les japonais sont habituellement très respectueux des règles. Mais bon on parle de rouler “trop vite” en allant à 100 km/h sur les autoroutes ! C’est un peu l'extrême opposé de l’Allemagne, où les routes “de campagne” sont limitées à 100 km/h et les autoroutes bien souvent sans limitation. C’est beaucoup moins surprenant par contre comparé aux États-Unis, où les autoroutes sont souvent limitées à 100-110 km/h (65 mph).
Sur une aire nous trouvons cette étrange machine pour acheter de la nourriture (en plus des machines classiques pour acheter des boissons) :
Il s’agit de plats surgelés qui sont décongelés par une sorte de micro-onde intégré. Nous avons testé par curiosité. Pour être honnête, les frites n’étaient vraiment pas terribles.
Enfin, nous arrivons à Ishinomaki et passons la nuit dans un hôtel où plusieurs chats se promènent et la décoration suit une thématique féline.
Tashirojima (田代島) dite “l’île aux chats” 🐱
Le lendemain matin, la neige a partiellement fondu, mais il pleut et nous pensons que ça ne vaut pas le coup d’aller sur l’île (on ne va pas caresser les chats sous la pluie !).
Mais plus tard dans la matinée, le temps s’améliore et nous décidons finalement de prendre le bateau. Ce n’est clairement pas la saison la plus touristique, il fait froid et il n’y a quasiment personne sur le bateau.
Dès notre arrivée, de nombreux chats sont présents sur le quai :
Nous nous promenons dans le village où nous pouvons admirer et parfois caresser de nombreux chats. Puis nous prenons le chemin qui passe dans la forêt dont nous pouvons admirer la végétation qui comporte de nombreux bambous.
Puis nous arrivons près d’un petit restaurant où des nombreux paniers ont été disposés pour accueillir les chats.
Il y a même un temple dédié aux chats un peu plus loin le long du chemin dans lequel des personnes rendant hommages à leurs chats décédés laissent de petites offrandes, statuettes etc. Nous rencontrons encore de nombreux chats puis prenons le bateau du retour de l’autre côté de l’île (nous ne sommes que quatre personnes à monter - quand on vous dit qu’il n’y a pas grand monde !).
La préfecture de Fukushima (福島県)
Après avoir passé une deuxième nuit à Ishinomaki (c’est la seule fois où nous sommes restés deux nuits au même endroit), nous voilà partis au Sud direction la préfecture de Fukushima. Contrairement ce qu’on pourrait penser, la ville de Fukushima n’est pas du tout le lieu où l’accident nucléaire célèbre a eu lieu. La centrale nucléaire porte le nom de la préfecture mais se situe en fait la ville de Ōkuma. Cette ville ainsi que Futaba (la ville à côté) sont en cours de nettoyage en 2019 et les habitants n’ont pas encore le droit d’y retourner. Le reste de la préfecture de Fukushima ne présente en revanche aucun risque particulier. Il y a d’ailleurs parfois des panneaux lumineux qui indiquent le niveau de radioactivité le long de l’autoroute et qui affichent un niveau normal (égal à la radioactivité naturelle).
Nous nous arrêtons pour déjeuner. Au passage j’en profite pour vous présenter une originalité de nombreux restaurants. On commande souvent avec une machine comme ci-dessous (je triche un peu, cette photo est de notre précédent voyage en fait).
Le fonctionnement est simple, on commence par payer en insérant des yens et on commande en appuyant sur les boutons. La machine donne alors un ticket qu’on donne ensuite au cuisinier. En Europe, le paiement à l’avance via une machine se fait uniquement dans les fast-foods, mais au Japon de nombreux petits restaurants ont de telles machines.
Les japonais ont l’habitude de payer presque toujours en espèces. Lors de notre voyage, nous n’avons utilisé notre carte bancaire qu’une seule fois, pour payer dans un grand hôtel. Une explication possible de cette habitude est que les vols de portefeuille sont extrêmement rares, on ne risque donc rien à avoir une grosse somme en espèces sur soi.
La nouvelle ère Reiwa (令和)
Pendant que nous dégustons notre plat (la nourriture est généralement très bonne au Japon), nous voyons en boucle une séquence à la télévision du restaurant, où l’on reconnaît le premier ministre Shinzo Abe qui porte à bout de bras une calligraphie. Il s’agit d’une annonce historique : le premier ministre vient de révéler le nom de la nouvelle ère du Japon, qui doit entrer en vigueur un mois plus tard lors de l’accession au trône du nouvel empereur.
Dans les documents officiels, l’année en cours n’est en effet pas notée 2019 mais 平成31年, c’est à dire la 31ème année de l’ère Heisei (平成), qui correspond au règne de l’empereur Akihito (l’empereur a un rôle symbolique, le Japon est une démocratie). C’est aussi sous cette forme que l’année de fabrication est indiquée sur les pièces de monnaie. Dans la vie économique en revanche, il est souvent d’usage d’utiliser l’année occidentale, par pragmatisme. Le nouveau nom d’ère annoncé est Reiwa (令和), qui peut avoir plusieurs sens et engendre des débats, mais le gouvernement clarifie que l’interprétation correcte est “ère de la belle harmonie”.
À suivre !
Cet article est déjà long, c’est pourquoi je vous raconterai la suite de notre aventure dans un second article. À bientôt.
Comments